Une clé sur un bureau lors d'une vente avant décès de l'usufruitier

Vente d’un bien immobilier en usufruit avant le décès de l’usufruitier : conditions et répartition

Dit comme ça, le démembrement, ça fait un peu peur. On pense aux films d’horreur un peu sanguins, par exemple. Rien de tout ça ici, pour le coup.

Celui qui nous intéresse, c’est le démembrement de propriété. En effet, comprendre les mécanismes de vente d’un bien en usufruit avant le décès de l’usufruitier s’avère essentiel pour prendre les bonnes décisions patrimoniales.

Lorsqu’une vente est envisagée du vivant de l’usufruitier, des connaissances précises sont nécessaires, notamment en ce qui concerne la séparation de la propriété entre usufruitier (droit d’usage) et nu-propriétaire (propriété future).

Je vous propose d’étudier les conditions et modalités de cette opération complexe mais parfois nécessaire.

En bref

Points essentielsDétails à retenir
🏠 Principe du démembrementComprendre la séparation entre usufruitier (droit d’usage) et nu-propriétaire (propriété future) avant toute décision.
📝 Accord obligatoireObtenir le consentement conjoint de l’usufruitier et du nu-propriétaire pour une vente avant décès de l’usufruitier.
💰 Répartition du prixDéterminer la valeur respective des droits selon le barème fiscal ou l’évaluation économique plus équitable.
🔄 Option de remploiRéinvestir l’intégralité des fonds dans un nouveau bien démembré pour préserver les avantages fiscaux initiaux.
⚖️ Convention de quasi-usufruitPermettre à l’usufruitier de disposer des fonds contre une créance au profit du nu-propriétaire.
📊 Implications fiscalesAnalyser l’impact sur la plus-value immobilière et l’IFI selon l’option choisie pour la répartition.

Vente avant décès de l’usufruitier : les droits respectifs de l’usufruitier et du nu-propriétaire

L’usufruit et la nue-propriété : rappel

Avant d’aborder techniquement la vente d’un bien immobilier avant décès de l’usufruitier, un rappel rapide de deux concepts clés s’impose.

L’usufruit et la nue-propriété composent la pleine propriété d’un bien. Par conséquent, les attributs du droit de propriété se répartissent entre : 

  • l’usufruitier, soit la personne qui dispose du droit de jouissance et d’usage du bien, sans être le propriétaire ;
  • le nu-propriétaire. Ce dernier a le droit de disposer d’un bien (en le vendant, le donnant, le léguant). Par contre, il n’a pas le droit d’utiliser le bien et d’en tirer des revenus (territoire gardé de l’usufruitier).

Lorsque le propriétaire sépare l’usufruit et la nue-propriété, par exemple lors d’une vente, on parle de démembrement du droit de propriété. 

Le démembrement de propriété, c’est quoi ?

La particularité du démembrement de propriété réside dans la répartition des droits entre deux parties. Sachez que ni l’usufruitier ni le nu-propriétaire ne peuvent agir seuls pour vendre le bien en pleine propriété.

Leur accord conjoint est juridiquement obligatoire pour toute transaction immobilière. Chacun peut néanmoins céder séparément son droit spécifique.

L’usufruitier conserve la possibilité de vendre uniquement son droit d’usage à un tiers. Attention, par contre : cet usufruit s’éteindra automatiquement à son décès, ce qui limite l’intérêt pour l’acquéreur.

En parallèle, si le nu-propriétaire décède, ses héritiers recevront automatiquement sa nue-propriété dans le cadre de sa succession.

💡 En parlant de propriété, retrouvez un exemple de titre de propriété dans l’article que je lui ai consacré.

Formalités et actes nécessaires

La procédure de vente exige un formalisme rigoureux. Le passage devant un notaire s’impose pour authentifier la transaction.

Une convention écrite doit précéder la vente pour clarifier la répartition du prix et les conditions applicables.

Le notaire vérifiera l’identité et les droits de chaque partie, ainsi que l’origine de propriété du bien immobilier concerné.

Quelles conséquences juridiques ?

La vente entraîne l’extinction définitive du démembrement sur le bien vendu. Les droits respectifs se reportent sur le prix de vente, créant une nouvelle situation juridique à encadrer soigneusement.

Pour la famille, cette transformation des droits réels en droits sur une somme d’argent modifie profondément la nature de la relation entre usufruitier et nu-propriétaire.

Les méthodes de répartition du prix de vente entre usufruitier et nu-propriétaire

Plusieurs approches permettent de répartir le produit de la vente entre les parties concernées (nu-propriétaire et usufruitier), au cours d’une vente avant décès de l’usufruitier.

Vente avant décès de l’usufruitier : le partage selon le barème fiscal

La méthode la plus courante utilise le barème fiscal de l’article 669 du Code général des impôts.

Ce barème détermine la valeur de l’usufruit selon l’âge de l’usufruitier, c’est-à-dire la part perçue lors de la vente : 

Âge de l’usufruitierValeur de l’usufruitValeur de la nue-propriété
Moins de 21 ans révolus90%10%
Moins de 31 ans révolus80%20%
Moins de 41 ans révolus70%30%
Moins de 51 ans révolus60%40%
Moins de 61 ans révolus50%50%
Moins de 71 ans révolus40%60%
Moins de 81 ans révolus30%70%
Moins de 91 ans révolus20%80%
Plus de 91 ans révolus10%90%

Afin que cela soit le plus clair possible, voici comment s’applique ce barème avec un exemple de vente avant le décès de l’usufruitier.

Imaginons que l’usufruitier est âgé de 50 ans lors de la vente. Il recevra 60% du prix de la vente.

Si le bien immobilier est vendu 100 000 €, il percevra 60 000 € (60% X 100 000). Le nu-propriétaire percevra le reste, soit 40 000 €. 

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Cette répartition présente l’avantage de permettre au nu-propriétaire de recevoir immédiatement sa part du capital.

Néanmoins, l’usufruitier perd l’avantage fiscal du démembrement puisque sa part sera de nouveau soumise aux droits de succession à son décès.

L’évaluation économique alternative

Pour une répartition plus équitable, je recommande souvent l’évaluation économique. Cette méthode prend en compte le rendement réel du bien et l’espérance de vie effective de l’usufruitier. Elle s’avère plus précise que le barème fiscal mais nécessite une expertise spécifique.

Le remploi des fonds : une solution de préservation fiscale

Connaissez-vous le remploi ? Il s’agit d’une option intéressante pour conserver les avantages fiscaux du démembrement.

Mécanisme du remploi, comment ça marche ?

Cette stratégie consiste à réinvestir l’intégralité des fonds issus de la vente dans un nouveau bien qui sera également démembré.

Le démembrement initial se reporte ainsi sur le nouveau support, qu’il soit immobilier ou financier. Cette solution préserve la cohérence juridique et fiscale de l’opération initiale.

Avantages et inconvénients du remploi

  • préservation du bénéfice fiscal du démembrement initial ;
  • maintien de l’équilibre patrimonial entre usufruitier et nu-propriétaire ;
  • possibilité d’investir dans un bien plus adapté aux besoins actuels ;
  • absence de liquidités immédiates pour le nu-propriétaire.

Formalisation du remploi

Le remploi doit impérativement figurer dans l’acte de vente avec l’indication précise de l’origine des fonds.

Une convention spécifique doit être établie avant la vente ou au plus tard lors de sa conclusion. Pour un remploi partiel, prévoyez clairement le sort des fonds excédentaires.

Une transaction monétaire lors d'une vente avant le décès de l'usufruitier.

La convention de quasi-usufruit : une alternative flexible

Le quasi-usufruit offre une solution souple pour les parties cherchant plus de liberté dans la gestion des fonds, lors d’une vente avant décès de l’usufruitier.

Quel est le principe du quasi-usufruit

Dans ce montage, l’usufruitier reçoit la totalité du prix de vente et peut en disposer librement.

Le nu-propriétaire devient créancier du quasi-usufruitier pour sa part théorique.

Cette créance devient exigible uniquement au décès de l’usufruitier, générant un équilibre entre liberté immédiate et protection future.

Avantages fiscaux et pratiques

  1. L’usufruitier dispose librement des fonds pour ses besoins.
  2. La créance constitue un passif déductible de la succession de l’usufruitier.
  3. Le nu-propriétaire bénéficie d’une protection juridique formalisée.
  4. La souplesse d’utilisation des fonds facilite leur valorisation.

Mise en place et sécurisation

La convention de quasi-usufruit doit impérativement prendre la forme d’un acte authentique ou sous seing privé enregistré.

Pour sécuriser la position du nu-propriétaire, des garanties comme une hypothèque ou une caution bancaire peuvent être mises en place.

Implications fiscales de la vente d’un bien en démembrement

La fiscalité constitue un aspect crucial de cette opération patrimoniale.

Imposition des plus-values immobilières

La plus-value est calculée et imposée individuellement pour l’usufruitier et le nu-propriétaire, chacun sur sa quote-part du prix.

L’usufruitier peut bénéficier d’une exonération si le bien constitue sa résidence principale. Les abattements pour durée de détention s’appliquent progressivement (exonération totale après 22 ans de détention pour l’impôt sur le revenu et 30 ans pour les prélèvements sociaux).

Quel impact sur l’Impôt sur la fortune immobilière ?

Maintenant, qu’en est-il de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), auquel vous êtes soumis si la valeur de votre patrimoine immobilier net après déduction des dettes dépasse 1 300 000 € ?

En principe, c’est l’usufruitier qui le paie. Les biens démembrés entrent en effet dans son patrimoine pour leur valeur en pleine propriété. 

Voici ce qu’il faut retenir à ce sujet : 

  • avant la vente, l’usufruitier déclare généralement le bien pour sa valeur en pleine propriété ;
  • après la vente, selon l’option choisie, l’assujettissement à l’IFI varie. À partir du moment où le bien est vendu, l’usufruitier n’a plus rien à déclarer au titre de ce bien ;
  • en cas de remploi immobilier, le nouveau bien sera soumis aux mêmes règles. 

Quels sont les avantages et inconvénients de la vente avant le décès de l’usufruitier ?

Pour terminer, je vous propose d’évoquer les opportunités et les risques en lien avec la vente avant le décès de l’usufruitier.

Avantages stratégiques et pratiques

La vente permet d’accéder à des liquidités immédiates pour financer de nouveaux projets ou faire face à des besoins spécifiques.

Elle offre aussi la possibilité d’investir dans un bien mieux adapté aux besoins actuels de l’usufruitier, comme un logement de plain-pied.

Pour le nu-propriétaire, elle valorise immédiatement son droit et évite les problèmes de gestion du bien (entretien, charges).

Inconvénients et risques de la vente avant décès de l’usufruitier

Si les avantages sont palpables, il convient également d’évoquer quelques inconvénients notables : 

  • perte de l’avantage fiscal lié à la reconstitution automatique de la pleine propriété au décès ; 
  • nécessité d’obtenir un accord parfois difficile entre usufruitier et nu-propriétaire ;
  • risque de double imposition du capital reçu par l’usufruitier lors de sa succession. 

En guise de conclusion sur cet article sur la vente avant le décès de l’usufruitier, je vous conseille vivement d’établir une convention écrite détaillée avant la vente.

Prévoyez le remploi ou le quasi-usufruit dès l’avant-contrat pour éviter toute contestation ultérieure.

Enfin, le recours à un notaire expérimenté en droit patrimonial et à un conseiller fiscal s’avère indispensable pour sécuriser l’opération et optimiser ses conséquences.

FAQ

Quelle est la part de l’usufruitier en cas de vente ?

Lors de la vente d’un bien en usufruit, l’usufruitier conserve une part de la valeur selon sa durée d’usufruit. La valeur de l’usufruit est calculée selon l’âge de l’usufruitier. La nue-propriété est transférée au nu-propriétaire. En cas de vente avant le décès, l’usufruitier peut vendre sa part, mais l’accord du nu-propriétaire est nécessaire.

Comment mettre fin prématurément à l’usufruit ?

L’usufruit peut être mis fin prématurément par plusieurs moyens : le décès de l’usufruitier, la renonciation volontaire de ce dernier, ou la vente de l’usufruit. Il est aussi possible de l’annuler par un accord entre l’usufruitier et le nu-propriétaire, en contrepartie d’une compensation financière.

Puis-je vendre la maison dont j’ai l’usufruit ?

Oui, un usufruitier peut vendre l’usufruit d’une maison, mais il ne peut pas vendre la pleine propriété sans l’accord du nu-propriétaire. La vente de l’usufruit permet à l’acheteur de jouir du bien jusqu’au décès de l’usufruitier. Cependant, cela n’implique pas la cession de la nue-propriété.

Quels sont les inconvénients de l’usufruit ?

Les inconvénients de l’usufruit incluent la restriction de la vente totale du bien et la fin de l’usufruit à la mort de l’usufruitier. De plus, l’usufruitier doit souvent prendre en charge l’entretien du bien et des charges courantes, tout en étant limité par les droits du nu-propriétaire concernant les modifications du bien.

À Propos de l'auteur
Emilie

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